vendredi 12 avril 2013

Luxe et volupté

Le saviez-vous? Ma Peugeot 504 diesel est une voiture de luxe. Je ne parle pas du luxe de la version injection et intérieur cuir, objet statutaire de la France giscardienne. Ce luxe somme toute frugal n'a rien à voir avec celui du marché américain, où depuis les années 1950, les acheteurs sont habitués aux vitres électriques, à la direction assistée et à l'air conditionné. D'où la débauche d'équipements (pour l'époque) dont Sochaux dotait sa berline aux Etats-Unis. Mais tout cela a un coût, et la 504, à la fin des années 1970, s'affichait neuve à un prix respectable: près de 10 000 dollars pour une version diesel automatique comme la mienne.
C'était 25% de plus qu'un modèle dit "de luxe" des trois grands de Detroit, comme la Ford LTD (photo de gauche), qui fait près d'un mètre supplémentaire de long et pèse quasiment le double! Et la 504 était même plus chère que les rares berlines diesel des constructeurs locaux, telle l'Oldsmobile Delta 88 (au passage, une catastrophe ambulante). Comme toujours dans ces cas-là, les équipes publicitaires ont dû faire preuve de créativité. "Vous pouvez payer un peu plus pour une voiture qui reste en un seul morceau", explique cette campagne du milieu des années 1970. Bien sûr, 34 ans d'inflation sont passés par là, et 10 000 dollars d'aujourd'hui ne suffiraient pas à payer la moins chère des voitures neuves aux Etats-Unis.
Mais pour donner un peu de perspective, en données constantes Peugeot demanderait aujourd'hui presque... 35 000 dollars pour une 504. A ce prix-là en 2013 on peut avoir une Ford Taurus, le plus gros modèle de la marque à l'ovale bleu, en version suréquipée (ci-contre à droite).
 Alors, pourquoi la 504 diesel s'est-elle finalement assez bien vendue en Amérique du Nord? A cause des crises pétrolières des années 1970, qui ont conduit les pouvoirs publics à accepter l'arrivée de modèles moins gourmands en carburant, dont des importations européennes. Et à ce jeu-là, la 504 constituait un véritable cadeau! Jugez-en: la Mercedes 240 D, un peu plus grande que la 504 diesel, un tout petit peu plus puissante mais pas moins bien équipée, s'affichait au prix délirant de 16 000 dollars, soit plus de 50 000 dollars de 2013.
On comprend donc la stratégie marketing de Peugeot, qui n'hésitait pas à se qualifier de "Mercedes français" (sic) dans une autre campagne destinée à séduire les acheteurs américains. "Un autre genre de voiture de luxe", en effet.

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